Booké pour la 21ème édition du festival breton Panoramas, Madben vient tout récemment de sortir son premier album, Fréquence(s), pierre angulaire d’un travail de près de deux ans. L’artiste parisien se confie.
Ton tout premier album est enfin sorti. Quel est ton état d’esprit ?
Je viens de lâcher ce premier album et c’est un projet qui a été assez long, assez chronophage car il a fallu à peu près deux ans de taf (1 an et demi à temps plein et 6 mois en jonglant avec plusieurs projets, ndlr). Je me sens un peu comme quelqu’un qui vient d’accoucher ! C’est un très long chemin, j’avais d’ailleurs eu un premier projet d’album qui a finalement été avorté il y a 3 ou 4 ans, car c’était trop tôt selon moi. Maintenant c’est fait, il est sorti ! On a fait ça chez Astropolis parce qu’on voulait boucler une boucle avec eux, puis Kompakt a pris la distribution du projet. Ça valait le coup d’attendre. Je me sens libéré !
Tu as donc pris presque 2 ans pour cet album. Quel matériel as-tu utilisé pour la composition de Frequence(s) ?
Cet album comporte 11 titres mais j’ai dû en écrire une cinquantaine au total, puis j’ai décidé d’en écarter par la suite pour avoir une cohérence dans la playliste finale. C’est beaucoup de temps d’écriture et tu as toujours envie d’aller plus loin. Puis tu passes tout ça dans un espèce d’entonnoir qui fait que tu n’as plus que 20 titres, 15 titres, 12 titres … Quand tu as les 11 titres tu te dis “je vais les rebosser”. Si tu veux tu peux ne jamais t’arrêter de les retravailler ! Mais à un moment donné il faut prendre des décisions et figer les choses.
Mon studio a beaucoup évolué ces dernières années, très certainement à cause de mon côté geek pour les synthés. Il y a des morceaux qui ont été travaillé il y a plus de 2 ans dans l’album, et d’autres qui ont été écrit avec des synthétiseurs hardware ; j’utilise un mélange entre du hardware et du software, entre des machines et des plug-ins. Quand j’achète un nouveau synthétiseur j’adore triturer les sons pour voir jusqu’où le son peut aller, et ce que ça peut ensuite donner dans un morceau.
Est-ce que ton processus de création a évolué depuis ton premier EP ?
Complètement ! Je pense qu’il faut toujours chercher à aller plus loin, comme je le disais à l’instant j’aime l’idée d’avoir un synthétiseur que je couple avec d’autres machines pour écouter quels sons en ressortent. Ma méthode de travail a changé, un peu à l’image d’un sportif qui a toujours envie de dépasser ses performances, d’aller plus loin.
Tu fais partie de la famille Astropolis. Quels sont les liens qui te lient à eux ?
Il y a des fois des gens qui croient que je suis breton, c’est assez marrant ! L’élément déclencheur a été un de mes premiers morceaux joué par Laurent Garnier dans son émission de radio It Is What It Is qui était diffusée sur le Mouv’ à l’époque. Suite à ça Gildas d’Astropolis m’a contacté pour me faire jouer sur le site de Beau Rivage en off. Ça a été d’abord une rencontre musicale, et ensuite humaine avec des dates à l’Astroclub ou autre. J’ai beaucoup de respect pour Gildas car il a vraiment oeuvré pour faire parler de ma musique en France et je suis très heureux de faire partie de cette belle aventure.
Tu as monté le projet Trunkline. Peux-tu nous expliquer en quoi il consiste ?
Avant ce projet j’écrivais de la musique avec Yannick sous le nom « Madben et Yann ». A cette époque, nous avons signé sur le label de John Digweed et sur Brique Rouge, avec une techno mélodique. Puis nous avons emménagé notre studio dans un local à Paris il y a deux ans, à une époque où je commençais à avoir pas mal de machines. Nous avons voulu revenir aux fondamentaux de la techno que nous avions adoré au tout début, à une techno brute de décoffrage et l’idée de donner un nom à ce projet nous a paru nécessaire : Trunkline est né ! Nous adorons jouer notre live avec des machines sur scène même s’il nous arrive de faire des dj-sets. Nous avons monté le label du même nom sur lequel nous sortons notre musique. La quatrième release est d’ailleurs sortie il y a peu avec un clip sur le titre « Alert », nous avons également sorti un remix pour Carl Cox et Nicole Moudaber.
Nous te connaissons techno mais écoutes-tu d’autres styles de musique ?
J’écoute beaucoup d’électro en journée donc le soir j’aime bien écouter d’autres choses. En ce moment c’est du métal, j’aime écouter mes petites madeleines de Proust genre Deftones, Korn. J’aime aussi la chanson française comme Bashung, ou du rap américain, du rap français mais pas celui qui passe sur les ondes.
Comment s’est passée la collaboration avec Laurent Garnier sur « MG’s Groove » ?
C’est le morceau le plus house de l’album, le plus “détroit-esque” même. Le track prend son temps et est super progressif dans son arrangement. La collaboration s’est très bien passée avec Laurent, on a vraiment passé de bons moments. Il y a un an je lui ai annoncé que j’étais en train de bosser et de terminer mon premier album et il s’avère qu’il avait un créneau libre dans son emploi du temps. Nous en avons donc profité : c’était une occasion parfaite de présenter une collaboration. Nous nous sommes beaucoup appelés pendant la quinzaine de jours où nous avons écris « MG’s groove ». Lui était dans le Sud et moi à Paris, nous nous sommes fixés une règle simple dès le départ : pas plus de deux pistes par aller-retour du projet entre nos studios. Puis le projet s’est finalisé lors d’une de ses venues à Paris, dans mon studio, pour terminer les dernières étapes.
La techno de Detroit c’est clairement ton dada. Pourquoi ce style ?
Ce sont les origines de notre mouvement ! C’est une musique à message, une musique composée par des mecs que je respecte énormément et qui m’ont fait voir la lumière, c’est pour ça que je la respecte beaucoup. J’aime la partie mélodique, la partie groove, froide. C’est un terme très générique maintenant mais à elle seule elle représente énormément dans la musique électronique.
Quel est ton regard sur la scène techno française d’aujourd’hui ?
Elle est en pleine explosion ! Il y a tellement de bonnes choses … La nouvelle génération de producteurs défonce tout et englobe très vite les codes et les influences de la musique électronique en général. Il y a moins de tabous même s’il y a des espèces d’ayatollah dans la techno … Des gens essaient de sectoriser la techno alors qu’en fait c’est un état d’esprit, rien de plus. Il faut rester dans le mood et ne pas passer son temps à critiquer.
Plus d’informations sur les concerts de Madben sur Kompakt Booking.
Interview réalisée par Maxime Menard